JOURNAL D'ÉMOIS

jeudi 5 octobre 2006

Belle Charlotte

Elle est là. Mon Dieu ! Enfin ! Ici… tout près si loin, délicieuse tentatrice couchée sur un grand drap de coton blanc. Toute bella. Offerte pour le péché d’un certain samedi soir. Musiques, moult désirs satisfaccion moultiples ! Bella rouquine arrivée à 18 heures pile poil, la voilà chez moi au quatorzième étage du centre-ville pour attendre… que JE la flatte, touche, goûte. Ce que je ferai, avec joie, mais... plus tard.

Plan C, planifié d’avance. Et ding ! Le moment précis finit par arriver…Un homme avec un chapeau étrange se présente ici tout à l'heure. Au-dessus de sa bouche une ligne de poils -blancs et courts-. Une casquette bleue. Un veston doublé pour ce soir de novembre. Le « messager » me salue, me demande si la bella Charlotte me plait. Après avoir acquiescé d’un doux sourire, marchandages n'étant pas de coutume, je le paye tout de go. Comptant. Enfin, me laissant seule avec Charlotte, il tire doucement la porte puis disparaît par le corridor de tapis; ce qui fait que je n'ai pas la torture d'entendre ses pas me cingler et se moquer en quittant.

Pendant que j'enfile mes nylons blacks sur mes pattes je rêve. Par deux paumes savantes j'enserre sur mon buste un serre-gorge, mamelons pointés. Je songe. Sur mes lèvres une crème luisante, une retouche avec l’index qui glisse, un brin de soleil dans le regard. Voilà! Pas plus pas moins. Le rouge à lèvre finira sur le dos de cette bella rousse, de toute façon, n’est-ce pas ? Elle, bella Charlotte, galbée, presque impudique, patiente. Et moi, joueuse, je flâne. Avec mon envie de son velours sucré sur le bout de ma langue jusqu'au palais; avec le désir de l'avoir toute entière pour moi seule. Mais je me retiens tout à fait. Oh ! C'est à peine si je la regarde ! Et, lorsque j'ose planter sur son corps parfait mes deux yeux gris pleins de nuages, ça me semble être un jeu fou et beau !

Trop ? Pas assez pour moi. Charlotte, rousse incendiaire paraît si fraîche… Bella ! Si riches les pores de sa peau maquillée. Son teint et ses formes m'allèchent tant, que j'en "sur-salive". Il faut me retenir. Alors je préfère m'amuser à réajuster mes jarretelles devant ce splendide miroir aux bordures de bronze. Un peu plus haut... et... plus serré sur les cuisses.




Voilà ! Beaucoup mieux ceci. Vlan! Je me décide. Je passe la porte ou je ne résisterai plus à cette folle beauté que je m'offre ce soir. Si je reste de visu à Charlotte, je ne dépends plus de mes gestes.

Je quitte donc l'antre confortable où je la fais patienter. Je me retiens d'y retourner. Des reins jusqu’aux lèvres je me retiens. Quoiqu'il arrive, je refuse de lui toucher avant que vingt heures n'aient sonné sur l'horloge de mes ancêtres.

…J'enfile de nouveaux souliers très hauts. Joujou. Quoique bien sculptés ils me semblent tout à coup des plus inconfortables. Je descends quelques marches. Métal sec. Clac ! Clac ! De riches décors m'envahissent dans ce penthouse sans poussière, sans bruit. Je m'assieds. Je pense au corps de la bella Charlotte, à ses effluves que j'imagine me subjuguer tendrement. Et voilà que, comme la saine louve à qui l'on arracherait son terrier, son gibier, son humus; ma bouche devient toute humide ! Si je ne me retenais, j'irais l'ouvrir la porte ! Avec mes deux mains s'il le faut ! Puis là... sur place, une fois devant ses charmes, je me placerais de côté ou... derrière ! Oui. Et je… lentement la dévorerais. J'irais chercher son suc avec deux petits bouts de doigts, le plus longuement et fémininement possible. Je palperais alors ses formes rondes d'une main hésitante mais agile, très habile... avec une infinie délicatesse.


Si je n'avais promis sa virginité à ce gourmand de Karlof, je n'attendrais pas un instant de plus. Très sincèrement. Mais, polie, altruiste ou je ne sais quoi (?) je me résigne et poursuis le suspense. Je mets la main à travailler l'ambiance. Tamise la lumière, fais jouer l'opéra, allume quelques bougies et prépare l'alcôve. Je regarde autour de moi. Tout semble parfait ! Il ne me reste qu'à trouver l'odeur que je porterai à mon cou.


Voyons voir... Néant, Cruelle Cannelle ou Ambre Bronzée ? Je crois que Cruelle Cannelle aiguiserait nos sens parfaitement mais que Ambre Bronzée nous attiserait davantage. J'applique finalement un soupçon, un rien de Néant sous le nombril; tout là où… c'est très précieux d'être très provocante !

Bientôt vingt heures et Karlof chéri qui va venir se pointer -Fort et Beau-, comme je les aime si rarement. Hum ! Du nouveau dans ma vie. Qui sait si nous aurons encore quelques sourires gratuits, quelques draps à mouiller, plus qu'une aurore à blêmir et des pénombres à souffrir ? Qui sait si j'aurai envie longtemps d'avoir son nom dans ma tête, ses fesses imprimées dans mes idées, son intelligence me tripoter et sa conne de bourgeoisie narguer la mienne ?

Qui veut savoir, si c'est de l'amour qui se frotte à nos peaux d'âmes, ou... si ne serait-ce pour lui, pour moi, qu'un passe le temps irrésistible et tuable tout autant ? Je préfère n'avoir aucun plan, aucun compte à rendre à mes souvenances. Je préfère agir comme si chaque jour était mon premier et mon dernier. Je n'ai même pas le désir qu'il cesse de plaire à tant d'autres. Je plais, il plaît, nous nous plaisons. Nous habitons deux mondes parallèles destinés à se mirer, sinon se toiser. L'union paraît lorsqu'il pousse en moi son nectar qui me rend divinement bien. Ce petit lait de millions d'enfants. GrRR!


AaaH! Bientôt le temps fatal d'ouvrir mes gestes à l’abandon. Encore plus près de vingt heures que c'est dépassé. Je me demande comment Karlof réagira à cette petite mise en scène ? Oh ! Il en est avisé mais ne LA connaît pas. Il l'a vu dans ce magazine duquel ensemble on fit le choix... Taille, couleur, origine, etc. J'espère voir ses yeux ambrés, royalement clairs (fabuleux) s'illuminer à sa vue ! Si... Tant... Tellement... Irrésistiblement belle cette jeune rousse.


Karlof a sonné. Alors j'ouvre, le fais entrer. Je lui retire son paletot et le dévisage d'un brasier de baisers. Mhummm! Chaudes et voluptueuses ses lèvres. Voilà mon ventre qui descend, qui pousse, qui allume la braise dans ma matrice. Les ovaires titillés, les écluses sans retenue… Mouillée son arrivée. On pleure de joie dans mon ventre !

Le Karlof me complimente sur ma tenue, rapidement. Puis il s'inquiète hardiment pour la jolie Charlotte; me demande de la lui décrire "en détaillé". Ce que je fais avec emphase et passion de la chose. Je lui dis que la photo ne mentait pas. Que même, elle est plus jolie en vrai.

Nous allons, Karlof et moi, dans cette pièce où elle attend encore sur son drap blanc. Couchée, prête à nous satisfaire tous les deux. Elle me semble plus belle encore que tout à l’heure. Le vice dans nos regards, Karlof et moi nous nous frottons les mains, prêts à attaquer la jolie proie. Nous approchons d'elle pour la respirer de plus près. Ah ! Comme son odeur enivre, attise. Qu’elle est belle.

Mais... Je décide de faire durer cette fausse éternité en remplissant nos minutes de vers, de magie poétique.




J'entraîne Karlof par la main... une main qui tremble... et propose que l'on aille s'asseoir un peu tous les deux seulement, prétextant vouloir discuter avant. Mais... Karlof ne veut ni ne peut plus la quitter des yeux. Ses sens sont presque au seuil d'une porte nirvanesque ! Quittant le silence, il me parle de ses attraits formidables et chuchote à mon oreille que : « C'est la plus belle qu'il ait vu ! » Je suis ravie de son bonheur et roucoule près de lui. Il m'embrasse sur le cou, mordille la jugulaire et me prouve par son sonore soupir qu'il adore l'odeur de ma peau nue.



J'entends à peine ce qu'il me conte tellement je ronronne et roucoule. Il me plaît tant, que je soulèverais ma jupe, là, à l'instant. Mais, en bonne femme du monde je me retiens le corps.

Le faut-il ? Noooooon. Alors je plonge ma main tremblante dans sa crinière abondante. Le Karlof, lui, gémit comme un âne. Touchant !
Touchant tout…

Je me noie dans ses magnifiques yeux fauves. J'ai l'impression de faire voyage dans une forêt gaspésienne. J'y vois le feu et j'y vois la rosée fraîche d'une larme salée qui résiste au temps. J'y vois la mer en bas de la falaise. Plus grande que le ciel ! Plus belle que le désert. J'y vois la force de Neptune mon mâle fantôme. Je nage dans son regard qui parle de nous. J'y vois nos désirs se forger, nos volcans, les grottes qu'on s'est inventé. J'y vois, ouais….encore, plus ! De mieux en mieux, nos deux âmes qui se déchirent et qui renaissent. Des corps sauvés par le plaisir. Mhumm……..




J'écoute parler ses yeux et, j'entends le cri du ventre sorti de nos jouissances collées... l'écho d'une tempête d’odeurs magnifiques. J'entends le bruit de nos langues qui se touchent et s'entrecroisent. L'enfer doux, fort, animal de nos plaintes si longues. Le calvaire de nos attentes délicieuses. Je vois le plaisir de nos paroles se mêler, se charmer. Je sens, nu, vrai, vif, son vit long et rond me toucher la main. Et… je suinte quelques fausses larmes.
Elles descendent sur mes cuisses.

Charmée, j’invente un sourire et je me lève doucement. Je vais remplir la pièce de violons et de pianos rapides. Karlof sourit. Je lui propose à boire. Il remplit deux verres d'une multitude de gouttelettes rouges. Rouges!!! Alcool, corps souffles et …satisfaction.


Il me questionne à savoir -quand- nous passerions aux autres actes prévus ! "Plus tard, lui dis-je, soyons patients. Que le temps passe un peu plus, nous apprécierons mieux." Je sais que plus tôt j'ai presque perdu le contrôle. Mais il faut croire que ce Karlof me fait oublier mon désir pour la bella rouquine.

Il insiste le mâle. Bonheur! Il mène le bal, viril et brave. Me soumettre oui, encore. Karlof, dépose son verre m'emmène vers la porte qui nous sépare de Charlotte. Je lui fais maintenant face. Je suis esclave, elle s'offre à nous. Belle... Nous lui sourions, comme deux enfants devant un jouet dont ils rêvent. Nous la regardons, la sachant prête à nous appartenir; à nous donner tout le plaisir que nous attendons d'elle. Quelle magnifique Charlotte!



Je crois... que nous ne pourrons plus très longtemps souffrir la distance. Non. Une puissante pulsion vient de nous saisir Karlof et moi. Sans plus de censure, sans plus en dire, nous marchons vers elle. Nous approchons, tel des fauves, tel des proies, vers le lit de Charlotte.

Servie pour le plaisir de nos regards elle fera bientôt le plaisir de nos sens. Délicieusement couchée dans une assiette d'argent, sur une grande nappe toute blanche, entourée de biscottes et de langues de chats, la bonne Charlotte russe nous servira d'entremets.

Et gourmande inlassable, je profite d'un court instant où Karlof se tourne et j'enfonce deux petits bouts de doigts dans ce merveilleux bijou culinaire. Je me délecte enfin!!

6 commentaires:

Anonyme a dit...

Ah que j'envie ce Karlof :)

Nina louVe a dit...

Onassis: Poster Belle Charlotte était un test. Par trois fois j'ai souhaité le retirer des ondes virtuelles avant d'aller dormir. Oui,un test à savoir si ce monologue pouvait se paser de la narratrice.Certaines maladresses agacent l'auteure mais pas la comédienne.On verra su il survivra jusqu'à novembre.

Vous l'enviez oui? Moi c'est Charlotte que j'aime désirer. (rires)

Anonyme a dit...

on pleure de joie dans mon ventre / je suinte quelques fausses larmes / j'emplis deux verres d'une multitude de gouttelettes rouges / je vais remplir la pièce de violons et de pianos / et d'autres...

Le style, la voix de Nina Louve

Nina louVe a dit...

Butineur: Merci. Je vous promets que dès que j'aurai un micro vous en aurez le souffle et les silences aussi.

Anonyme a dit...

Comment peut-on écrire aussi chaud - torride - tropical : comme si j'y étais !!!

Nina louVe a dit...

Saravane: Merci, vous me rendez cette chaleur.